Politique de la ville

Politique de la ville : historique et piètre bilan

Des dates, des sigles et des institutions, des chiffres clefs et des indicateurs pour tenter de s’y retrouver dans la politique de la ville, qui, depuis sa création en 1977, n’a pas fait la preuve de son efficacité…


La politique de la ville, c’est la mise en place de mesures spécifiques pour certains quartiers jugés en difficulté. Éducation, logement, emploi, les mesures mises en place par la politique de la ville ont pris différentes formes.

Il se peut que tout ne soit pas parfaitement exact ci-dessous… J’apprends en même temps. Remarques bienvenues.


DATES

On peut identifier trois grands âges de la politique de la ville : développement social des quartiers (années 1980), mobilisation du droit commun par les contrats de ville (années 90) et rénovation urbaine (années 2000).

1977 : Raymond Barre, Premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing, envoie une lettre aux Préfets, affirmant le besoin d’ « enrayer la dégradation physique et sociale » des grands ensembles.

1977 : Premier plan banlieue « Habitat et vie sociale » sous la direction de Jacques Barrot, secrétaire d’État au logement.
Il s’agit de réhabiliter les HLM avec l’aide financière de l’État.

1981 : Révoltes des Minguettes dans la banlieue de Lyon.
Lancement du dispositif « Opérations anti été chaud », ensuite rebaptisé « Opérations prévention été » puis « Ville-Vie-Vacances ».

1981 : Création des ZEP, au nombre de 170, par Alain Savary, ministre de l’Éducation nationale.

1981 : Trois rapports qui seront les fondements de la politique de la ville :

  • Le rapport Schwartz (1981) : « L’insertion professionnelle et sociale des jeunes ». Entraîne la création des Missions locales et de la Délégation interministérielle aux jeunes.
  • Le rapport Bonnemaison (1982) : « Face à la délinquance : prévention, répression, solidarité ». Introduit la notion de « prévention de la délinquance ».
  • Le rapport d’Hubert Dubebout (1983), maire de Grenoble et membre fondateur de son Groupe d’action municipale : « Ensemble, refaire la ville ». Amène la mise en oeuvre des opérations de Développement Social des Quartiers (DSQ) et la constitution du Conseil national du DSQ.

1983 : Plan « Banlieues 89 » pour désenclaver et enjoliver les banlieues.

1984-1988 : Premiers contrats de plan Etat-régions, intégrant le DSQ : 148 conventions concernant environ 170 quartiers.

1988 : Création de la Délégation interministérielle à la ville, en remplacement du Conseil national du DSQ.
Création du Conseil national des villes.

1989 : Création des Contrats de ville.

1990 : Après les révoltes de Vaulx-en-Velin, création d’un ministère de la politique de la ville, qui a pour objectif de faire du social avec de l’urbain.

1991 : Loi d’orientation pour la ville, qui fixe des objectifs de diversité de l’habitat et de mixité sociale.
Premiers Grands Projets urbains du gouvernement de Michel Rocard.

1992 : Bernard Tapie, nouveau ministre de la ville, démissionne trois jours après avoir proposé un « plan pour les banlieues ».

1994 : Premiers Contrats de ville sous l’impulsion de Simone Veil, ministre des Affaires sociales dans le gouvernement d’Édouard Balladur.

1996 : Pacte de relance pour la ville du gouvernement d’Alain Juppé, qui se veut une sorte de « Plan Marshall » de l’État pour les banlieues? Crée les ZUS (au nombre de 751), ZRU et ZFU (au nombre de 100), contre la « fracture sociale » dénoncée par Jacques Chirac.

1999 : Nouveaux contrats de ville.
Programme de rénovation urbaine du Comité interministériel à la ville : GPV et ORU.

2000 : Loi SRU qui notamment impose aux villes de plus de 3500 habitants d’offrir au moins 20% de logements sociaux.
Au-delà, cette loi a trois objets : solidarité, développement durable, renforcement de la démocratie et de la décentralisation.

2003 : Loi Borloo d’orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.
Lance le PNRU et crée l’ANRU.
Ajout de 41 nouvelles ZFU.
Création d’un observatoire national des ZUS (l’actuel Observatoire national de la politique de la ville). Prévoit la construction, la réhabilitation et la destruction de logements sociaux.

2005 : Révoltes dans les banlieues.
Création des Préfets délégués à l’égalité des chances.
Création de 41 ZFU supplémentaires.

2006 : Loi pour l’égalité des chances.
Crée 15 nouvelles ZFU.

2006 : Loi portant Engagement National pour le Logement (ENL).

2007 : Remplacement des Contrats de ville par le CUCS.

2008 : Plan banlieue, « Une nouvelle politique en faveur des banlieues », présenté par Nicolas Sarkozy.
Cette nouvelle politique est précédée d’une présentation « Espoir Banlieues : une dynamique pour la France », par Fadela Amara à Vaulx-le-Pénil.

2012 : Un rapport de la Cour des comptes pointe des problèmes de gouvernance et souligne que la plupart des objectifs de la politique de la ville n’ont pas été atteints.

2013 : Rapport de Marie-Hélène Bacqué et Mohamed Mechmache : « Pour une réforme radicale de la politique de la ville ».
Il met sur le devant de la scène la notion d’empowerment et l’idée de renforcer la participation des citoyens, particulièrement à la mode depuis les révoltes de 2005.

2014 : Loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, adoptée le 21 février.

  • Suppression des ZUS et des CUCS, remplacés par les Contrats de ville.
  • Ciblage de 1300 quartiers prioritaires, au lieu de 2500 précédemment.
  • Création des Conseils citoyens, offre institutionnelle de participation, qui s’inscrivent dans la continuité des dispositifs de « démocratie participative » instaurés depuis 30 ans.

 


SIGLES & INSTITUTIONS

On en rirait si ce n’était pas si triste…

Ministère de la ville : créé en 1990.

CIV : Comité interministériel des villes et du développement urbain.
Il réunit tous les ministres concernés, sous l’autorité du Premier ministre ou du ministre de la ville, et contribue à la définition des grandes orientations de la politique de la ville.

Conseil national des villes : Créé en 1988, il est placé auprès du Premier ministre, il contribue à la définition des grandes orientations de la politique de la ville.

DSQ : Développement Social des Quartiers.
Mis en œuvre à la suite du rapport d’Hubert Dubedout, 1983.
CNDSQ : Conseil national des DSQ.
Le CNDSQ était dirigé par des Maires.
Délégation interministérielle à la ville : remplace, à partir de 1988, le CNDSQ. Contrairement à ce dernier, elle est administrée par des fonctionnaires.

Loi SRU : Solidarité et Renouvellement Urbain, 2000.
Élaborée autour de trois thèmes : solidarité, développement durable, renforcement de la démocratie et de la décentralisation.

PNRU : Programme National de Rénovation Urbaine.
Mis en place en 2003 par la loi Borloo.
« Vise à restructurer, dans un objectif de mixité sociale et de développement durable, les quartiers classés en ZUS ».

ANRU : Agence nationale pour la Rénovation Urbaine.
Guichet unique pour le PNRU.

ACSÉ : Agence pour la Cohésion Sociale et l’Égalité des chances.
Remplacée en 2014 par le CGET.

CGET : Commissariat Général à l’Égalité des Territoires.
Remplace l’ACSÉ à partir de 2014.

Observatoire national de la politique de la ville

ZEP : Zone d’Éducation Prioritaire, créées en 1981.

ZUS : Zone Urbaine Sensible. Créées en 1996 et supprimées en 2014 (remplacées par le contrat de ville). Elles étaient au nombre de 751. Comprennent les ZRU, qui elles mêmes englobent les ZFU.

ZRU : Zone de Redynamisation Urbaine. Sous-ensemble des ZUS. Également supprimées en 2014, elles étaient au nombre de 416.

ZFU : Zone Franche Urbaine. Sous-ensemble des ZRU. Crées en 1996 et supprimées en 2014, elles étaient au nombre de 100. Les entreprises qui s’y installaient pouvaient y obtenir des exonérations fiscales.

ZRU : Zones de Redynamisation Urbaine. Crées en 1996.

Contrat de ville (canal historique) : Créés en 1989, puis remplacés par les CUCS de 2007 à 2013, ils sont aujourd’hui de retour.
Les premiers contrats de ville ont été lancés en 1994, puis en 1999.
Ils avaient pour objet de permettre la réalisation de projets urbains par la voie contractuelle, en associant l’État, les collectivités locales et leurs partenaires.
À partir de 1999, il y avait 2 formes principales de Contrats de ville :
Les GPV : Grands Projets de Ville
Les ORU, Opérations de Renouvellement Urbain, dont le GPRU, Grand Projet de Renouvellement Urbain, pour Paris.

CUCS : Contrat Urbain de Cohésion Sociale.
Remplacent les Contrats de ville entre 2007 et 2013.
Contrats d’une durée de 3 ans, reconductibles.

Contrat de ville (le retour) : Créé par une loi de programmation en 2014, il remplacera à partir de juin 2015 les nombreux dispositifs qui existaient jusque là (CUCS, conventions de rénovation urbaine, zones franches urbaines).

Quartier politique de la ville : Quartiers visés par la politique de la ville.
2500 quartiers jusqu’en 2014.
1300 depuis la mise en place des Contrats de ville.


CHIFFRES CLEFS & INDICATEURS

Budget de la politique de la ville :
Au projet de loi de finances 2015 : 450 millions d’euros de crédits d’engagements, ce qui est relativement peu comparé aux dépenses totales de l’État (environ 380 milliards d’euros). Il est difficile d’analyser l’évolution de ces crédits, tellement la politique de la ville regroupe de thématiques, et tellement ces dernières évoluent d’une année sur l’autre.

Évolutions constatées depuis la promulgation de la loi Borloo en 2003 : comparaison entre les ZUS et le reste du territoire français

Depuis 2003, les écarts de développement se sont accrus entre les ZUS, où vivent 7% des Français, et le reste du territoire :

  • Entre 2003 et 2010, le taux de chômage a augmenté dans les ZUS : de 17% en 2003 à 21% en 2010, contre 10% hors ZUS.
  • Près d’un tiers des habitants en ZUS vivaient avec poins de 954€ par mois en 2009, contre 12% en dehors de ces zones.
  • En 2008, le revenu fiscal moyen des ménages était presque deux fois moindre en ZUS qu’ailleurs, à 12 615€ par an, contre 22 532€ dans le reste de la France.
  • Seule amélioration : le taux de réussite au brevet, qui a augmenté entre 2005 et 2010.

 

 


 Sources :

Article « Politique de la ville : quarante ans d’échecs », par Ania Nussbaum, paru sur LeMonde.fr le 5 février 2015.

Article « Politique de la ville » sur Wikipedia, consulté en février 2015.

Différents articles de Thomas Kirszbaum, sociologue de l’urbain :

2 réflexions sur « Politique de la ville : historique et piètre bilan »

  1. Absolument génial ce bref résumé. Merci ! ( je travaille sur un rapport de stage qui a lieu dans les quartiers politiques de la ville de Brest, ce résumé m’aide beaucoup – j’hésite à le copier tel que !

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